Parce qu’il n’est pas, dans l’état actuel du droit, considéré́ comme un crédit à la consommation »[5], le paiement fractionné offre une grande souplesse à tous les acteurs. « Pour les clients, c’est plus de facilités de paiement : ils peuvent lisser leurs dépenses et mieux maîtriser leur budget, tout en ayant accès à plus de produits et services, surtout en période de crise inflationniste, comme aujourd’hui.
Chez les retailers, il booste la compétitivité en les incitant à innover pour des parcours encore plus fluides et plus intuitifs. Des offres de paiement fractionné arrivent aujourd’hui sur le marché qui permettent au consommateur de lisser son paiement a posteriori, une fois le produit acheté. Enfin, c’est une solution qui favorise évidemment le chiffre d’affaires en rendant possible des achats compliqués pour les consommateurs ». Avec le paiement fractionné, on estime que la valeur du panier moyen augmente de 20 à 70% [6] en fonction des secteurs d’activité. « Pour tous, c’est une solution simple et transparente », conclut Betrand Pineau.
Mais cet élan attire aussi l’attention des régulateurs, et c’est bien normal, car le risque de surendettement est toujours présent. « En France, nous sommes bien pourvus en matière de protection contre le surendettement grâce à un reporting rigoureux des institutions bancaires introduit notamment par la Loi Lagarde du 1er juillet 2010. Et la réglementation européenne va également évoluer avec la révision de la directive sur le crédit conso qui sera prochainement adoptée ».
L’innovation technologique au service de solutions de paiement plus fluides, plus intuitives
La Directive sur les services de paiement 2 (dite DSP2) a également contribué à sécuriser le paiement dans le e-commerce en renforçant l’authentification des consommateurs, notamment lors d’un paiement fractionné. Elle a aussi ouvert l’accès aux données des comptes de paiement tenus par les banques. « Les Fintechs peuvent ainsi utiliser cette data pour continuer à innover en matière de nouvelles solutions de paiement, et de mise en place de prélèvement par exemple », précise Bertrand Pineau.
La DSP3 et le règlement associé, dont les premières versions de textes viennent d’être publiées, poussera encore plus loin les capacités d’innovation en harmonisant notamment la mise en œuvre de ces dispositions partout en Europe. Autre projet, l’ European Payments Initiative (EPI) [7] qui lancera d’ailleurs en juin 2024 une nouvelle solution de paiement basée sur le virement instantané (et donc indépendante des réseaux de cartes).
Elle apportera des parcours de paiement fractionné dans son offre destinée au e-commerce et aux retailers (à partir de 2025). [8] « Cette solution fait l’objet de développement important ailleurs dans le monde (Inde, Brésil …) et est déjà bien implantée « culturellement » dans une forme très proche en Allemagne et au Bénélux historiquement moins « carte » que la France. Le développement du virement instantané associé à l’open Banking devrait aussi faciliter les paiements inter-entreprises sur le marché du B to B, qui était jusque-là le parent pauvre des facilités de paiement », s’enthousiasme le directeur général de Mercatel.
Une chose est sûre, le paiement fractionné a encore de belles innovations devant lui.
[1] PayPlug, PrestaShop et Oney démocratisent le Buy Now Pay Later
[2] Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Crédoc), dans l’Introduction à Le crédit direct des commerçants aux consommateurs : persistance et dépassement dans le textile à Lens (1920-1970)
[3] Ce comportement a même participé pour Richard Hoggart à dessiner les « frontières culturelles des classes populaires » (1970 : 43-46), dans l’Introduction à Le crédit direct des commerçants aux consommateurs : persistance et dépassement dans le textile à Lens (1920-1970)
[4] Boltanski et Chamboredon, 1963, cités dans l’Introduction à Le crédit direct des commerçants aux consommateurs : persistance et dépassement dans le textile à Lens (1920-1970)
[5] Rapport annuel du Comité consultatif du secteur financier, 2022.
[6] https://www.bfmtv.com/economie/entreprises/oney-le-boom-du-paiement-fractionne_AO-202205130007.html
[7] Basé sur un projet de Wallet européen (consortium de banques européennes)
[8] Disponible en juin 2024 pour les particuliers, en 2025 pour les acteurs du e-commerce, et début 2026 chez les commerçants de proximité.